Haïti, quand la lutte pour la survie est criminalisée
- Par Jean Willer Marius – 19 février 2019
Si Haïti dans ses composantes étatiques désuètes, et les interventions sporadiques et intéressées de faux amis n’a pas su planter les jalons développementaux pour sortir de l’exécrable misère, il a réussi, ces derniers jours à défrayer la chronique internationale où des journalistes bien nantis s’en donnent à cœur joie parlant d’Haïti comme le pays le plus pauvre de l’hémisphère omettant sciemment de mentionner le pays le plus appauvri s’excluant automatiquement de la débâcle et nous tiennent pour seuls responsables de notre sort.
La lutte pour la survie qui embrase Haïti depuis deux semaines était inévitable
Quand un peuple subit depuis des lustres, les affres de la faim et de la déshumanisation, quand l’injustice et la répartition inégale de la richesse nationale le maintiennent dans les tenailles de la misère la plus abjecte, c’est tout naturellement que la colère trop longtemps réprimée explose. Ça a produit ce résultat constaté, mais non définitif.
Aujourd’hui, des gens vertueux rivalisent ou épuisent leurs qualificatifs dans une gradation descendante, ils qualifient de sauvagerie et quantifient les actes de ce peuple spolié, poussé vers ses derniers retranchements. Ce, avant de passer à table. Seuls, non, en famille, pour le souper. Se soucient-ils du bien-fondé, c’est-à-dire, depuis bien longtemps les mots tels : déjeuner, dîner, souper, loisirs… etc., y ont disparu du vocabulaire de l’Haïtien. Ces humains traités comme des canards sauvages. Comprenons-le, ce sont des inscrits à la liste de chasse aux canards sauvages, quelle vertu ! Il leur faudrait vraiment ce minimum de bien-être à cette vertu ?
Les efforts pour sauver ce gouvernement parasitaire issu d’un système dépassé seraient légion. L’observateur avisé qui a su prendre le recul raisonnable afin de se libérer de tout esprit partisan constatera que l’acteur moralisateur jouissait dans son déni. Quand, plus d’une fois, on a tous tiré la sonnette d’alarme. On tentait d’enrayer ce déferlement dans la capitale aliénée. Une violence en réaction et/ou provoquée ?
Mauvais princes, ils se basent sur le talon d’Achille de la foule de meneurs. Des meneurs peu catholiques dans l’opposition certes il y a des énervés, des infiltrés. Quand des gens vraiment dignes rechignent à prendre les devants, craignant pour leur vie dans un contexte où tout est possible. Ils multiplient sans élégance astuces, coups montés et coups bas pour criminaliser le peuple haïtien qui tente avec le peu de ressources qui lui reste avant de succomber, mais avec sinon plus de force, de desserrer l’étau qui étreint son humanité, devenant entre-temps sujet de discussion.
Au lieu de tenir compte des légitimes revendications d’un peuple, qui évolue aujourd’hui encore en dessous de la base de la pyramide de Maslow, et son état va s’empirant. Ils préfèrent déployer sommes et efforts qu’ils n’ont pas su utiliser pour enrayer sa misère, pour faire échec à sa lutte pour la survie, avec la presse en sus, et le contraindre à demeurer dans les ténèbres.
Un calme apparent se profile à l’horizon et les stratèges qui excellent dans les basses manœuvres triomphent déjà. Oubliant qu’à moins de continuer à faire venir des mercenaires pour les tuer tous, ce peuple au passé glorieux, qui a défait des généraux réputés invincibles pour mettre fin à l’esclavage imposé par les donneurs d’ordre, renaîtra de ses cendres avec l’énergie du désespoir. Réécrire une nouvelle page de son histoire.
Le dollar extorqué en Haïti est exporté ailleurs, faisant de cette face sombre de l’ile, un grand fournisseur de devises. L’aide internationale dessine un arc de cercle en passant par Port-au-Prince puis retourne au lieu de sa provenance, reconfirmant la théorie biblique de la forme circulaire de la terre.
Celui qui dort sur ses lauriers tandis que ses voisins sont tenus éveillés par la faim risque de connaître un réveil brutal. Les verra-t-il atterrir dans sa cuisine pour atténuer leur faim, et, aussi rétablir l’équilibre ?
collaboration spéciale de JWM-Magazine